Embaumement extrême : scénariser le défunt lors de ses funérailles est à la mode

25 juin 2018 : Renard Matthews est abattu dans une rue de la Nouvelle Orléans alors qu’il promène son chien. Terrassée par le chagrin, la famille de ce jeune homme de 18 ans ne peut se résoudre à le faire enterrer sans lui rendre un ultime hommage à la hauteur de ce qu’il était. Avant de rejoindre sa tombe dans le cimetière du Interment Providence Memorial Park, Renard va donc passer par la Charbonnel Labat Glapion Funeral Home, établissement funéraire spécialisé dans ce qu’on appelle aux États-Unis les « non traditionnal memorial services », les services funéraires inhabituels, à savoir l’ « extreme embalming ».

 

L’image de la vie

Une fois embaumée et et les soins de conservation effectués, son corps a donc été revêtu de son jogging préféré et de son maillot fétiche, glorifiant l’équipe de basket des Boston Celtics ; il a été installé, tongs aux pieds, dans un fauteuil, avec en mains une manette PSA et devant lui une télévision diffusant une partie de NBA2K, son jeu vidéo favori. Sur le nez ses lunettes de soleil, à ses côtés un paquet de chips Doritos et une root beer. Ses proches ont ainsi eu ainsi l’opportunité de lui rendre un ultime témoignage d’affection en le contemplant dans son attitude quotidienne.

Une pratique qui se démocratise

La chose peut choquer, c’est pourtant une option qui tend à se démocratiser aux USA. Apparue à Porto Rico en 2008, cette méthode vise à scénariser le mort dans une activité qu’il affectionnait particulièrement de son vivant. On oublie l’exposition du corps en cercueil, le défunt est mis en scène dans l’apparence de la vie.

On peut citer plusieurs exemples notoires : un défunt assis à une table de poker pour disputer une dernière partie avec ses intimes, une quinquagénaire assise à table avec une cigarette et une bière, un boxeur debout sur un ring, gants aux poings, prêt à disputer un combat, un motard installé à cheval sur son bolide, une fêtarde invétérée sur un divan arborant son fameux boa de plume …

© Channel Five
© Chanel Five

Rendre hommage en favorisant le deuil

Même Lionel Baptiste, le célèbre batteur du groupe Treme Brass Band, a ainsi été placé à côté de sa batterie, sa canne préférée à la main, posant pour la postérité. L’objectif est bien sûr de célébrer le défunt dans ses passions, ses loisirs, de valoriser ce qu’il était, ses engagements, son identité, ses choix, son mode de vie. C’est aussi une manière, décalée certes, mais néanmoins pertinente, de faire son deuil en évitant l’exposition en cercueil qui place le défunt dans une situation de gisant, immobile, passif.

La technique employée repose sur un embaumement soigneusement dosé … et l’art de savoir positionner la dépouille, la maquiller, l’habiller, lui donner l’apparence de la vie. La chose est ardue car il faut stabiliser le corps, neutraliser le processus de décomposition sans figer les chairs. Le pire serait de caricaturer le défunt, de le placer dans une situation grotesque, Il faut donc demeurer subtil, demander des indications aux proches, préparer la cérémonie en adéquation avec la famille.

L’embaumement extrême est-il envisageable en France ?

En France, l’embaumement extrême n’a pas encore émergé, loin de là, ne serait-ce que, parce qu’aux yeux de nombreuses personnes, il contredirait l’article 16-1-1 du Code Civil :

« les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence ».

Techniquement, il impliquerait des soins de thanatopraxies très poussés. Par ailleurs, le temps imposé pour gérer la mise en scène risque d’excéder le délai imparti pour la réalisation des funérailles qui est de six jours maximum après le décès.

Enfin la tendance des funérailles écologiques qui dénonce l’emploi des produits chimiques nécessaires à l’embaumement, la hausse conséquente des crémations vont à l’encontre de ce type d’exhibition, dont la facturation risque d’être élevée.
Bref, on en n’est pas encore à inscrire ce type de pratique dans les ultimes volontés liées à son contrat obsèques ou son testament. Néanmoins l’exposition scénarisée du corps pourrait ultérieurement trouver un écho grandissant, dans l’individualisation des obsèques, où de plus en plus, on cherche à mettre en avant le défunt dans sa singularité.

Nous évoquions il y a quelques mois le cas d’un motard mis en terre avec sa moto chérie. Une première qui pourrait en annoncer d’autres, y compris l’apparition de la mise en scène des corps ...

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