Inde : un crématorium conçu comme un aéroport

Décidément la croyance en l’envol de l’âme des défunts vers l’au-delà demeure vivace aux quatre coins du monde. Ainsi, la petite ville de Bardoli située en Inde dans l’État du Gujarat, abrite le Last Flight to Salvation Airport (Antim Udam Moksha Airport très exactement) qui devrait ouvrir officiellement ses portes à l’automne 2017 : un aéroport qui est en fait un incinérateur destiné à accueillir les dépouilles des morts.

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Révolution des mœurs et contes pour enfants

Président du puissant groupe industriel « Rupaben Sitaram », Somabhai Patel est à l’origine de ce projet de rénovation : l’infrastructure en question, vieille d’une trentaine d’années, nécessitait un sérieux coup de jeune, pour continuer à assurer la crémation des disparus issus des nombreux bourgs voisins. Le métamorphoser en aérodrome suscite donc un vif intérêt parmi les médias du pays et la population, dans ce pays où la crémation fait partie les traditions séculaires, mais est généralement opérée sur les places publiques, au su et au vu de tous.

Il s’agit  donc d’un véritable tournant dans les usages puisque Patel inaugure là le premier site cinéraire à thème, équivalent dans sa conception à un parc de loisirs inspiré par ce que lui contaient ses parents quand il était enfant pour le rassurer face à la mort : l’âme des défunts s’envole vers le ciel en avion. Imprégné par ces récits merveilleux et poétiques, l’homme d’affaire  a donc repensé tout le crématorium … comme un aéroport.

L’atmosphère d’un aéroport

Les trois incinérateurs électriques et les deux fours à bois plus classiques qui équipent le complexe sont positionnés autour d’un terminal, comme des portes d’embarquement numérotées ; les familles sont invitées à les rejoindre par des annonces vocales au moment où le défunt est introduit dans l’habitacle. Un bruit de moteur au décollage couvre le son des brûleurs, et c’est le vrombissement d’un atterrissage qui accompagne la fin de l’opération, au moment de récupérer les cendres. Par ailleurs, tout le décorum suit les codes d’un aéroport.

La salle d’attente est surmontée d’un panneau annonçant une gigantesque liste de destinations, des caméras surveillent le lieu, des affiches de prévention sanitaire couvrent les murs, avertissant des dangers du tabagisme et de l’alcoolisme. A l’extérieur un grand parc fleuri favorise la promenade sous le regard des statues de divinités. Point d’orgue du complexe, devant l’entrée du hall trônent deux répliques d’avions, Air Paradis et Air Délivrance, qui à l’origine auraient dû accueillir les fours, installation finalement impossible d’un point de vue technique.

Service gratuit et mutation de société

Ainsi conçu, le crématorium a pour finalité de soulager les familles confrontées à la perte d’un être aimé. Il s’agit d’accompagner le deuil, en concrétisant l’image de l’envol vers la vie éternelle comme un décollage aéronautique : « l’âme du défunt vient seulement de partir en voyage » résume Patel.

Régi par la fondation du groupe Sitaram, le Last Flight to Salvation Airport est initialement gratuit, ce qui est une aubaine pour les familles pauvres, vu le prix élevé des crémations, notamment du bois qui sert de combustible. On demande juste aux proches qui le peuvent de faire un don ; du reste la transformation du lieu a été financée de cette façon.

Avant même sa réouverture officielle, il suscite l’intérêt des journalistes et des habitants qui viennent visiter les installations, y prenant photos et vidéos qui transitent ensuite sur le web, augmentant encore plus l’intérêt. C’est que le principe adopté par cette entreprise secoue les croyances et les coutumes, proposant une incinération à la fois originale et plus intime, alors que les traditions imposaient jusqu’à présent des crémations publiques au bord des rivières sacrées notamment, où les fils aînés devaient fracasser le crâne des parents pour faciliter l’accès de l’esprit au ciel. Bref le concept de Patel pourrait bien redéfinir le rapport à la mort et la place qu’elle occupe dans une société hiérarchisée par les castes, qui si elle connecte la vie et le trépas, semble avide de transformation et de modernité.

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Pierre C.

Fondateur de Lassurance-obseques.fr

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